Calcul de la Largeur d’une Semelle Filante
Contexte : Les fondations superficielles.
Les fondations d'un ouvrage constituent son assise et permettent de transmettre les charges de la structure vers le sol. Une semelle filanteFondation superficielle en béton armé, de faible largeur et grande longueur, généralement coulée sous un mur porteur. est une fondation superficielle utilisée sous les murs porteurs (façades, refends) pour répartir les charges linéiques sur une plus grande surface et ainsi éviter de dépasser la capacité portante du sol. Le dimensionnement correct de sa largeur est une étape cruciale pour garantir la stabilité de l'ensemble de la construction.
Remarque Pédagogique : Cet exercice vous apprendra à dimensionner la largeur d'une semelle filante en appliquant la méthode de vérification des contraintes sur le sol à l'État Limite de Service (ELS)État pour lequel le fonctionnement normal de la structure est assuré (déformations, fissures, vibrations limitées). Les calculs à l'ELS visent le confort et la durabilité., une compétence fondamentale en génie civil.
Objectifs Pédagogiques
- Calculer la combinaison de charges de calcul à l'ELS.
- Comprendre et appliquer le principe de non-dépassement de la contrainte admissible du sol.
- Dimensionner la largeur minimale d'une semelle filante et choisir une largeur constructive adaptée.
Données de l'étude
Modélisation de la semelle sous mur
Paramètre | Description | Valeur | Unité |
---|---|---|---|
G | Charge permanenteCharges constantes ou de faible variation dans le temps (poids propre de la structure, cloisons, revêtements, etc.). | 120 | kN/m |
Q | Charge d'exploitationCharges variables liées à l'usage du bâtiment (personnes, mobilier, neige, etc.). | 50 | kN/m |
q_adm | Contrainte admissible du solPression maximale que le sol peut supporter sans risque de tassement excessif ou de rupture. Elle est déterminée par une étude géotechnique. | 0,25 | MPa |
Questions à traiter
- Calculer la charge linéaire totale à l'État Limite de Service (ELS).
- Déterminer la largeur minimale requise pour la semelle.
- Proposer une largeur constructive (pratique) pour la semelle et justifier ce choix.
Les bases du dimensionnement de fondations
Le dimensionnement des fondations superficielles repose sur un principe simple : la pression exercée par la fondation sur le sol ne doit jamais excéder la pression que le sol est capable de supporter.
1. Combinaison de charges à l'ELS
Pour vérifier les conditions de service (tassements), on utilise la combinaison d'actions quasi-permanente (ou fréquente) à l'ELS. Pour un calcul simple, on utilise la combinaison de base :
\[ P_{\text{ser}} = \sum G_k + \sum Q_{k,1} \]
Pour cet exercice, cela se simplifie en : \( P_{\text{ser}} = G + Q \).
2. Vérification de la contrainte sur le sol
La contrainte exercée par la semelle est la charge totale divisée par la surface de contact. Pour une semelle filante, on raisonne par mètre linéaire.
\[ \sigma_{\text{sol}} = \frac{P_{\text{ser}}}{B \times 1 \text{ ml}} \le q_{\text{adm}} \]
Où \(B\) est la largeur de la semelle.
Correction : Calcul de la Largeur d’une Semelle Filante
Question 1 : Calculer la charge linéaire totale à l'ELS
Principe
Pour le dimensionnement des fondations à l'État Limite de Service (ELS), on doit sommer toutes les charges qui s'appliquent sur la structure de manière réaliste, sans coefficients de pondération majorateurs comme à l'ELU. L'objectif est de vérifier les tassements sous des charges de service.
Mini-Cours
En génie civil, les charges (ou actions) sont classées en plusieurs catégories. Les plus communes sont les charges permanentes (G), qui incluent le poids propre de la structure, et les charges d'exploitation (Q), qui sont liées à l'usage du bâtiment. Pour vérifier une structure à l'ELS, on utilise des "combinaisons d'actions" définies par les normes. La combinaison la plus simple, dite "caractéristique", consiste à additionner la valeur nominale de chaque charge.
Remarque Pédagogique
Pensez à l'ELS comme à la "vie de tous les jours" du bâtiment. On ne s'attend pas à ce qu'il subisse des conditions extrêmes, mais on veut s'assurer qu'il reste confortable et sans dégradations visibles (fissures, tassements). C'est pourquoi on utilise des charges non majorées, plus représentatives de la réalité quotidienne.
Normes
La méthode des combinaisons d'actions est définie dans la norme Eurocode 0 (NF EN 1990) - "Bases de calcul des structures". La formule générale pour la combinaison caractéristique à l'ELS est \( \sum_{j \ge 1} G_{k,j} + Q_{k,1} + \sum_{i > 1} \psi_{0,i} Q_{k,i} \). Dans notre cas simplifié avec une seule charge d'exploitation, elle devient \( G + Q \).
Formule(s)
La combinaison de base à l'ELS pour les charges de bâtiment est la somme des charges permanentes et d'exploitation.
Hypothèses
Pour ce calcul, nous posons les hypothèses suivantes :
- Les charges G et Q sont des charges statiques et uniformément réparties le long du mur.
- Il n'y a pas d'autres actions variables (comme le vent ou la neige) à prendre en compte dans cette étude simplifiée.
Donnée(s)
Paramètre | Symbole | Valeur | Unité |
---|---|---|---|
Charge permanente | G | 120 | kN/m |
Charge d'exploitation | Q | 50 | kN/m |
Astuces
Gardez toujours une trace des unités à chaque étape. Ici, les deux charges sont en kN/m, donc on peut les additionner directement. Si l'une avait été en daN/m, une conversion aurait été nécessaire avant le calcul. C'est un réflexe simple qui évite de nombreuses erreurs.
Schéma (Avant les calculs)
Composition des charges linéaires
Calcul(s)
Calcul de la charge de service
Schéma (Après les calculs)
Charge de service résultante
Réflexions
La valeur de 170 kN/m représente la charge que chaque mètre de mur transmet à la fondation en conditions normales d'utilisation. C'est cette charge qui va "appuyer" sur le sol.
Points de vigilance
Ne pas confondre la combinaison ELS (G+Q) avec la combinaison ELU (généralement 1.35G + 1.5Q). Utiliser la mauvaise combinaison mènerait à un surdimensionnement (ou sous-dimensionnement) incorrect des fondations pour la vérification des tassements.
Points à retenir
La distinction entre les combinaisons de charges à l'ELS (pour le service, les tassements) et à l'ELU (pour la résistance, la rupture) est fondamentale. À l'ELS, on ne majore généralement pas les charges (ou avec des coefficients de 1.0).
Le saviez-vous ?
Les coefficients de pondération (comme 1,35 et 1,5) utilisés dans les calculs à l'ELU ne sont pas arbitraires. Ils découlent d'analyses statistiques complexes qui tiennent compte de la variabilité des matériaux et des charges pour garantir un niveau de sécurité cible sur la durée de vie de l'ouvrage.
FAQ
Questions fréquentes pour cette étape.
Résultat Final
A vous de jouer
Si une charge de neige de 20 kN/m était ajoutée, quelle serait la nouvelle charge \(P_{\text{ser}}\) (considérant la neige comme une charge d'exploitation Q) ?
Question 2 : Déterminer la largeur minimale requise pour la semelle
Principe
Le principe de base est d'assurer que la pression (contrainte) exercée par la fondation sur le sol est inférieure ou égale à la pression maximale que le sol peut supporter (sa contrainte admissible). C'est une condition de non-poinçonnement du sol.
Mini-Cours
En mécanique des sols, la contrainte (\(\sigma\)) est définie comme une force (F) appliquée sur une surface (A) : \(\sigma = F/A\). Dans notre cas, la "force" est la charge linéaire \(P_{\text{ser}}\) (en kN/m) et la "surface" est la surface de contact de la semelle sur 1 mètre de long, soit B x 1m (en m²). La contrainte au sol est donc la charge linéaire divisée par la largeur B.
Remarque Pédagogique
Imaginez que vous marchez sur de la neige. Avec des chaussures, vous vous enfoncez. Avec des raquettes, qui ont une plus grande surface, vous répartissez votre poids et vous ne vous enfoncez pas. La semelle joue exactement le même rôle que la raquette : elle répartit la charge du mur sur une surface assez grande pour que le sol puisse la supporter.
Normes
La vérification de la capacité portante des fondations superficielles est régie par l'Eurocode 7 (NF EN 1997) - "Calcul géotechnique". Cette norme précise les méthodes de calcul et les vérifications à effectuer pour assurer la stabilité des fondations vis-à-vis du sol.
Formule(s)
On part de la condition de contrainte et on isole la largeur B.
Hypothèses
Nous supposons que la charge \(P_{\text{ser}}\) est centrée sur la semelle, ce qui engendre une répartition uniforme des contraintes sur le sol. Dans le cas de charges excentrées, le calcul est plus complexe.
Donnée(s)
Paramètre | Symbole | Valeur | Unité |
---|---|---|---|
Charge de service | \(P_{\text{ser}}\) | 170 | kN/m |
Contrainte admissible | \(q_{\text{adm}}\) | 0,25 | MPa |
Astuces
Attention aux unités ! La contrainte admissible est souvent donnée en Mégapascals (MPa). Il est crucial de la convertir en kilopascals (kPa) ou en kilonewtons par mètre carré (kN/m²) pour être cohérent avec la charge \( P_{\text{ser}} \) qui est en kN/m.
Schéma (Avant les calculs)
Équilibre des pressions
Calcul(s)
Étape 1 : Conversion d'unité de la contrainte admissible
Étape 2 : Calcul de la largeur minimale \(B_{\text{min}}\)
Schéma (Après les calculs)
Largeur minimale calculée
Réflexions
Ce résultat de 0,68 m est la largeur strictement minimale pour que le sol ne soit pas surchargé. Toute largeur inférieure entraînerait un risque de tassements excessifs, voire de rupture du sol. C'est donc une limite à ne jamais franchir.
Points de vigilance
L'erreur la plus fréquente est l'oubli de la conversion d'unités pour la contrainte. Si on divise 170 par 0,25, on obtient une largeur de 680 m, ce qui est absurde et doit immédiatement alerter sur une erreur.
Points à retenir
La largeur d'une semelle est inversement proportionnelle à la capacité portante du sol. Pour un même bâtiment, un "mauvais" sol (faible \(q_{\text{adm}}\)) nécessitera des fondations plus larges qu'un "bon" sol (\(q_{\text{adm}}\) élevé).
Le saviez-vous ?
Le célèbre ingénieur autrichien Karl von Terzaghi est considéré comme le père de la mécanique des sols moderne. Ses travaux au début du 20ème siècle ont transformé l'étude des fondations d'une approche empirique à une véritable science.
FAQ
Questions fréquentes pour cette étape.
Résultat Final
A vous de jouer
Si la contrainte admissible du sol était de 0,15 MPa, quelle serait la nouvelle largeur minimale ?
Question 3 : Proposer une largeur constructive pour la semelle
Principe
La largeur calculée (0,68 m) est une valeur théorique minimale. Sur un chantier, il est plus simple et plus sûr d'utiliser des dimensions arrondies, faciles à coffrer et à tracer. On choisit donc toujours une valeur constructive supérieure ou égale à la valeur minimale calculée.
Mini-Cours
Les "dimensions constructives" sont des dimensions standards utilisées dans le bâtiment pour faciliter la construction. Elles tiennent compte des dimensions des outils (pelles, coffrages) et des matériaux (blocs, briques). Pour les fondations, on arrondit généralement aux 5 ou 10 cm supérieurs. Cette petite marge supplémentaire apporte aussi une sécurité additionnelle.
Remarque Pédagogique
Les dimensions constructives sont généralement des multiples de 5 cm, voire 10 cm. Cela simplifie la mise en œuvre et la commande des matériaux. On arrondit toujours à la valeur supérieure pour rester du côté de la sécurité.
Normes
Il n'y a pas de norme stricte imposant les dimensions constructives, mais elles relèvent des "règles de l'art" et des bonnes pratiques de la construction, souvent décrites dans des documents techniques comme les DTU (Documents Techniques Unifiés) en France.
Formule(s)
Il ne s'agit pas d'une formule mais d'une règle d'arrondi à la valeur supérieure multiple de 5 ou 10 cm.
Hypothèses
On suppose que le terrain permet de réaliser facilement un terrassement avec une largeur de 70 cm, ce qui est une hypothèse raisonnable pour une fondation standard.
Donnée(s)
Paramètre | Symbole | Valeur | Unité |
---|---|---|---|
Largeur minimale calculée | \(B_{\text{min}}\) | 0,68 | m |
Astuces
En cas de doute, il vaut toujours mieux choisir une largeur légèrement plus grande. Le surcoût en béton est souvent négligeable par rapport au gain en sécurité et à la tranquillité d'esprit.
Schéma (Avant les calculs)
Largeur théorique à arrondir
Calcul(s)
Arrondi à la valeur constructive supérieure
Schéma (Après les calculs)
Largeur constructive adoptée
Réflexions
Le passage de la valeur calculée à la valeur constructive est une étape clé qui fait le lien entre la théorie (le calcul) et la pratique (le chantier). Un bon ingénieur est celui qui sait non seulement calculer mais aussi proposer des solutions réalisables et pragmatiques.
Points de vigilance
Ne jamais arrondir à l'inférieur ! Arrondir 0,68 m à 0,65 m mettrait la structure en danger car la contrainte sur le sol dépasserait la valeur admissible.
Points à retenir
Les dimensions finales d'un élément structurel sont un compromis entre le strict minimum calculé, les contraintes de mise en œuvre, et une petite marge de sécurité supplémentaire. On arrondit toujours à la valeur supérieure.
Le saviez-vous ?
Pour les très grands ouvrages comme les ponts ou les gratte-ciels, les fondations ne sont plus de simples semelles. On utilise des systèmes de "radier" (une dalle de béton sous toute la surface du bâtiment) ou des "pieux" qui vont chercher le sol résistant en profondeur, parfois à plusieurs dizaines de mètres.
FAQ
Questions fréquentes pour cette étape.
Résultat Final
A vous de jouer
Si un calcul donnait une largeur minimale de 0,81 m, quelle largeur constructive (multiple de 5 cm) adopteriez-vous ?
Outil Interactif : Simulateur de Largeur de Semelle
Utilisez les curseurs pour faire varier les charges et la contrainte du sol afin de voir leur impact sur la largeur minimale de la semelle.
Paramètres d'Entrée
Résultats Clés
Quiz Final : Testez vos connaissances
1. Le calcul de la largeur d'une semelle se fait en vérifiant la contrainte sur le sol à :
2. Quelle est la conversion correcte pour 0,18 MPa ?
3. Si la charge totale (\(P_{\text{ser}}\)) augmente, la largeur minimale de la semelle :
Glossaire
- Charge d'exploitation (Q)
- Charges variables qui dépendent de l'utilisation du bâtiment (mobilier, personnes, neige, etc.).
- Charge permanente (G)
- Charges fixes qui agissent en permanence sur la structure (poids propre des éléments, revêtements, cloisons fixes, etc.).
- Contrainte admissible du sol (\(q_{\text{adm}}\))
- Valeur maximale de la pression que le sol peut supporter sans risque de rupture ou de tassements excessifs. Elle est issue d'un rapport géotechnique.
- État Limite de Service (ELS)
- État au-delà duquel les conditions d'exploitation et de confort des usagers ne sont plus satisfaites (fissuration, déformation).
- Semelle filante
- Élément de fondation superficielle, continu et de faible largeur, placé sous un mur porteur pour transmettre et répartir ses charges sur le sol.
D'autres exercices de Fondations:
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