Résistance au Cisaillement d'une Argile Surconsolidée
Contexte : La stabilité des pentes, un enjeu majeur en géotechnique.
En mécanique des sols, la résistance au cisaillement est la propriété la plus importante pour analyser la stabilité des ouvrages en terre (pentes, talus, fondations). Pour les argiles qui ont été soumises dans leur passé à des contraintes plus fortes qu'aujourd'hui (argiles surconsolidées), on distingue la résistance de pic, mobilisée pour de faibles déformations, et la résistance résiduelleLa résistance la plus faible d'un sol argileux, atteinte après de grandes déformations de cisaillement. Les particules d'argile s'alignent le long du plan de rupture, réduisant drastiquement le frottement., qui subsiste après de grands déplacements. La détermination de cette dernière est cruciale pour l'analyse de la stabilité à long terme des glissements de terrain réactivés.
Remarque Pédagogique : Cet exercice illustre le passage de données brutes de laboratoire (essai de cisaillement) à la détermination de paramètres fondamentaux du sol (\(c', \phi'\)). Ces paramètres sont ensuite utilisés par les ingénieurs dans des modèles de calcul pour vérifier la sécurité d'un talus ou dimensionner un mur de soutènement. C'est le lien direct entre la caractérisation du matériau et le design d'un ouvrage.
Objectifs Pédagogiques
- Interpréter les résultats d'un essai de cisaillement direct.
- Tracer les points expérimentaux dans le plan de Mohr (\(\tau, \sigma'_{\text{n}}\)).
- Déterminer les paramètres de résistance de pic (\(c'_{\text{p}}, \phi'_{\text{p}}\)).
- Déterminer les paramètres de résistance résiduelle (\(c'_{\text{r}}, \phi'_{\text{r}}\)).
- Comprendre la différence fondamentale entre le comportement de pic et le comportement résiduel d'une argile surconsolidée.
Données de l'étude
Schéma de l'essai à la boîte de cisaillement
Essai N° | Contrainte Normale Effective, \(\sigma'_{\text{n}}\) (\(\text{kPa}\)) | Contrainte de Cisaillement de Pic, \(\tau_{\text{p}}\) (\(\text{kPa}\)) | Contrainte de Cisaillement Résiduelle, \(\tau_{\text{r}}\) (\(\text{kPa}\)) |
---|---|---|---|
1 | 100 | 85 | 36 |
2 | 200 | 130 | 73 |
3 | 300 | 175 | 109 |
4 | 400 | 220 | 146 |
Questions à traiter
- Représenter les points expérimentaux (\(\sigma'_{\text{n}}, \tau_{\text{p}}\)) et (\(\sigma'_{\text{n}}, \tau_{\text{r}}\)) dans un diagramme de Mohr.
- Déterminer les paramètres de résistance au cisaillement de pic (cohésion effective de pic \(c'_{\text{p}}\) et angle de frottement effectif de pic \(\phi'_{\text{p}}\)).
- Déterminer les paramètres de résistance au cisaillement résiduelle (cohésion effective résiduelle \(c'_{\text{r}}\) et angle de frottement effectif résiduel \(\phi'_{\text{r}}\)).
- Comparer et interpréter les deux jeux de paramètres. Dans quel contexte d'ingénierie utiliserait-on les paramètres résiduels ?
Les bases de la Mécanique des Sols
Avant la correction, revoyons les concepts fondamentaux de la résistance au cisaillement.
1. Critère de Rupture de Mohr-Coulomb :
La résistance au cisaillement (\(\tau\)) d'un sol peut être décrite par une relation linéaire avec la contrainte normale effective (\(\sigma'_{\text{n}}\)). Cette relation, appelée critère de Mohr-Coulomb, est la base de la géotechnique :
\[ \tau = c' + \sigma'_{\text{n}} \tan(\phi') \]
Où \(c'\) est la cohésion effective (l'adhérence entre les grains) et \(\phi'\) est l'angle de frottement effectif (résistance due à la friction entre les grains).
2. Résistance de Pic vs. Résiduelle :
Pour une argile dense ou surconsolidée, la résistance augmente jusqu'à un pic (\(\tau_{\text{p}}\)). Cela est dû à l'enchevêtrement des particules et à la dilatance (le sol doit se dilater pour se cisailler). Si le cisaillement continue, les particules s'alignent dans la direction du cisaillement, créant une surface polie ("slickenside"). La résistance chute alors à une valeur minimale constante, la résistance résiduelle (\(\tau_{\text{r}}\)).
3. Paramètres Effectifs (\(c', \phi'\)) :
En mécanique des sols, on utilise les contraintes effectives (principe de Terzaghi : \(\sigma' = \sigma - u\)), qui représentent les contraintes réellement supportées par le squelette solide du sol. Les paramètres \(c'\) et \(\phi'\) sont donc des caractéristiques intrinsèques du squelette du sol, indépendantes des conditions hydrauliques.
Correction : Résistance au Cisaillement d'une Argile
Question 1 : Représenter les points dans le diagramme de Mohr
Principe (le concept physique)
Le diagramme de Mohr est une représentation graphique de l'état de contrainte. Dans notre cas, on l'utilise pour visualiser la relation entre la contrainte de cisaillement (\(\tau\)) sur un plan et la contrainte normale effective (\(\sigma'_{\text{n}}\)) agissant sur ce même plan. En plaçant les points de rupture mesurés en laboratoire sur ce graphique, on peut visualiser la "loi de comportement" du sol au cisaillement.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Chaque point (\(\sigma'_{\text{n}}, \tau\)) représente l'état de contrainte sur le plan de cisaillement imposé dans la boîte de cisaillement au moment de la rupture (pic ou résiduelle). L'ensemble de ces points pour différentes contraintes normales forme une courbe (ou une droite en première approximation) appelée "enveloppe de rupture". Tout état de contrainte en dessous de cette enveloppe est stable, tout état de contrainte sur l'enveloppe correspond à la rupture.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
La première étape de toute analyse géotechnique est de "faire parler les données". Tracer un graphique est le moyen le plus simple et le plus puissant pour cela. Avant même tout calcul, le graphique vous montrera si les points sont bien alignés, s'il y a un point aberrant, et vous donnera une première idée de la cohésion (ordonnée à l'origine) and de l'angle de frottement (la pente).
Normes (la référence réglementaire)
La représentation graphique des essais de cisaillement est une pratique standardisée dans les normes géotechniques comme l'ASTM D3080 ou la norme NF P94-071. Ces normes définissent les procédures d'essai et les méthodes de base pour l'interprétation des résultats, dont le tracé des enveloppes de rupture.
Formule(s) (l'outil mathématique)
Il n'y a pas de formule pour cette étape, il s'agit d'une construction graphique. On utilise un repère cartésien avec \(\sigma'_{\text{n}}\) en abscisse et \(\tau\) en ordonnée.
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que les données de laboratoire sont fiables, que l'échantillon est représentatif du massif de sol et que les conditions de l'essai (consolidé drainé) sont appropriées pour le problème étudié.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
On utilise les couples de points du tableau de l'énoncé :
- Points de pic: (100, 85), (200, 130), (300, 175), (400, 220)
- Points résiduels: (100, 36), (200, 73), (300, 109), (400, 146)
Astuces(Pour aller plus vite)
Utilisez du papier millimétré ou un logiciel tableur (Excel, Google Sheets) pour tracer les points. Choisissez des échelles identiques pour les deux axes si possible (\(\text{1 cm} = \text{50 kPa}\) par exemple) pour visualiser l'angle de frottement de manière réaliste.
Schéma (Avant les calculs)
Diagramme de Mohr Vide
Calcul(s) (l'application numérique)
Cette étape consiste à placer les points sur le graphique. Il est essentiel de choisir une échelle appropriée pour bien visualiser les données. Par exemple, 100 kPa peut correspondre à 100 pixels sur chaque axe.
Schéma (Après les calculs)
Points Expérimentaux sur le Diagramme de Mohr
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La représentation graphique montre clairement deux familles de points distinctes. Les points de pic (en rouge) se situent nettement au-dessus des points résiduels (en bleu). Les deux ensembles de points semblent s'aligner le long de deux droites différentes, confirmant que le comportement du sol change entre le pic et l'état résiduel.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
L'erreur la plus commune est une erreur d'échelle ou une inversion des axes. Assurez-vous que la contrainte normale (\(\sigma'_{\text{n}}\)) est bien sur l'axe des abscisses (horizontal) et la contrainte de cisaillement (\(\tau\)) sur l'axe des ordonnées (vertical). Une erreur ici rendrait l'interprétation de l'angle de frottement impossible.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le diagramme de Mohr (\(\tau\) en fonction de \(\sigma'_{\text{n}}\)) est l'outil de base pour visualiser la résistance au cisaillement.
- Le tracé des points de l'essai est la première étape indispensable avant toute interprétation.
- Il faut tracer séparément les points de pic et les points résiduels.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Christian Otto Mohr (1835-1918) était un ingénieur civil allemand, pionnier de la mécanique des structures. Son cercle de Mohr, bien connu des étudiants, est une construction graphique encore plus générale qui permet de visualiser l'état de contrainte en 2D et de trouver les contraintes sur n'importe quel plan, pas seulement le plan de rupture.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Sur votre graphique, le point (300, 109) correspond-il à un état de pic ou résiduel ?
Question 2 : Déterminer les paramètres de pic (\(c'_{\text{p}}, \phi'_{\text{p}}\))
Principe (le concept physique)
Les paramètres de résistance de pic, \(c'_{\text{p}}\) et \(\phi'_{\text{p}}\), décrivent la résistance maximale que le sol peut mobiliser. Ils définissent la droite de Mohr-Coulomb qui enveloppe au mieux les points de rupture de pic. L'angle de frottement \(\phi'_{\text{p}}\) représente la pente de cette droite, tandis que la cohésion \(c'_{\text{p}}\) représente son ordonnée à l'origine.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La méthode la plus rigoureuse pour déterminer la meilleure droite est la régression linéaire (méthode des moindres carrés). Elle minimise la somme des carrés des distances verticales entre les points de données et la droite. L'équation de la droite est \(\tau = a\sigma'_{\text{n}} + b\), où la pente \(a = \tan(\phi'_{\text{p}})\) et l'ordonnée à l'origine \(b = c'_{\text{p}}\).
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
L'enveloppe de pic représente la "force brute" du sol intact. La cohésion de pic \(c'_{\text{p}}\) n'est pas une "colle" au sens chimique, mais plutôt le reflet de l'histoire des contraintes du sol. C'est une pseudo-cohésion qui disparaîtra si la structure du sol est détruite. C'est un paramètre essentiel pour le dimensionnement des fondations sur un sol vierge.
Normes (la référence réglementaire)
Les normes géotechniques, comme l'Eurocode 7, précisent comment obtenir les "valeurs caractéristiques" des paramètres du sol à partir des données de laboratoire. Cela implique souvent de tracer l'enveloppe de rupture et de choisir une droite prudente qui passe en dessous de la plupart des points, afin de tenir compte de la variabilité du sol.
Formule(s) (l'outil mathématique)
On cherche l'équation de la droite de pic :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On fait l'hypothèse que le critère de Mohr-Coulomb (une droite) est une représentation suffisamment précise de la résistance du sol dans la gamme de contraintes testée. Pour des gammes de contraintes très larges, l'enveloppe de rupture peut être légèrement courbe.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Points de pic: (100, 85), (200, 130), (300, 175), (400, 220)
Astuces(Pour aller plus vite)
Pour une estimation rapide sans calculatrice de régression, on peut tracer la droite "à l'œil" ou prendre les deux points extrêmes (1 et 4) pour calculer la pente : \(a = \Delta\tau / \Delta\sigma'_{\text{n}} = (220-85) / (400-100) = 135/300 = 0.45\). Ensuite, on trouve \(\phi'_{\text{p}} = \arctan(0.45)\) et on calcule \(c'_{\text{p}}\) en utilisant un des points : \(c'_{\text{p}} = \tau_{\text{p}} - \sigma'_{\text{n}} \tan(\phi'_{\text{p}})\).
Schéma (Avant les calculs)
Recherche de l'Enveloppe de Pic
Calcul(s) (l'application numérique)
En utilisant une régression linéaire sur les 4 points de pic, on obtient :
On en déduit l'angle de frottement de pic :
Schéma (Après les calculs)
Enveloppe de Rupture de Pic
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La cohésion non nulle (40 kPa) et l'angle de frottement de 24.2° sont typiques d'une argile surconsolidée. La cohésion représente la "rigidité" initiale du sol due à son histoire géologique. Ces deux paramètres définissent la limite supérieure de la résistance que le sol peut offrir tant qu'il n'a pas subi de grandes déformations.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne pas extrapoler la droite de rupture de pic trop loin en dehors de la gamme des contraintes testées (ici 100-400 kPa). L'enveloppe de rupture réelle des sols est souvent courbe et l'approximation linéaire n'est valable que localement. Une extrapolation à de très faibles ou très fortes contraintes peut être erronée.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- L'enveloppe de pic est déterminée par la droite de régression des points (\(\sigma'_{\text{n}}, \tau_{\text{p}}\)).
- L'ordonnée à l'origine est la cohésion de pic \(c'_{\text{p}}\).
- L'angle de frottement de pic \(\phi'_{\text{p}}\) est l'arc tangente de la pente de la droite.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
La dilatance, contribution majeure à la résistance de pic, est le phénomène par lequel un matériau granulaire dense augmente de volume lorsqu'il est cisaillé. Pensez à marcher sur du sable mouillé et dense : votre pied devient sec autour car le sable se dilate en créant des vides qui aspirent l'eau. Cette expansion requiert de l'énergie, qui est perçue comme une résistance supplémentaire.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Avec les paramètres de pic déterminés, quelle serait la résistance au cisaillement \(\tau_{\text{p}}\) attendue pour \(\sigma'_{\text{n}} = 250 \, \text{kPa}\) ?
Question 3 : Déterminer les paramètres résiduels (\(c'_{\text{r}}, \phi'_{\text{r}}\))
Principe (le concept physique)
De la même manière que pour le pic, les paramètres résiduels \(c'_{\text{r}}\) et \(\phi'_{\text{r}}\) définissent la droite de Mohr-Coulomb qui représente la résistance minimale du sol après de grandes déformations. L'alignement des particules argileuses le long du plan de rupture tend à annuler les effets de cohésion. Pour cette raison, la cohésion résiduelle \(c'_{\text{r}}\) est souvent très faible et peut être considérée comme nulle pour les calculs.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Physiquement, la cohésion \(c'\) dans les argiles surconsolidées est souvent liée à la "mémoire" de la contrainte maximale passée qui a "soudé" les particules. Lors de grands déplacements, cette structure est irrémédiablement détruite. La résistance ne dépend plus que du frottement entre les feuillets d'argile alignés, ce qui se traduit par une enveloppe de rupture résiduelle passant par l'origine (\(c'_{\text{r}} = 0\)).
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
L'hypothèse \(c'_{\text{r}} = 0\) est une pratique d'ingénierie très courante et généralement prudente. Forcer la droite de régression à passer par l'origine est souvent la meilleure façon de déterminer l'angle de frottement résiduel \(\phi'_{\text{r}}\). C'est cet angle qui représente la friction pure entre les particules de sol une fois que toute la structure a été "effacée" par le cisaillement.
Normes (la référence réglementaire)
Les essais pour déterminer la résistance résiduelle, comme l'essai de cisaillement annulaire (ring shear test), sont spécifiquement conçus pour imposer de très grandes déformations et obtenir une valeur fiable de \(\phi'_{\text{r}}\). Les normes comme l'ASTM D6467 encadrent ces essais plus complexes, nécessaires pour les projets à haut risque (grands barrages, stabilité de pentes sur des glissements anciens).
Formule(s) (l'outil mathématique)
On cherche l'équation de la droite résiduelle, en forçant souvent le passage par l'origine :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On fait l'hypothèse que la cohésion résiduelle est négligeable (\(c'_{\text{r}} = 0\)), ce qui est physiquement justifié pour les argiles cisaillées sur de grandes distances. La droite de régression est donc contrainte de passer par l'origine (0,0).
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Points résiduels: (100, 36), (200, 73), (300, 109), (400, 146)
Astuces(Pour aller plus vite)
Si l'on suppose que \(c'_{\text{r}}=0\), la droite passe par l'origine. On peut alors calculer \(\tan(\phi'_{\text{r}})\) pour chaque point (\(\tau_{\text{r}} / \sigma'_{\text{n}}\)) et faire la moyenne. Ex: 36/100=0.36, 73/200=0.365, 109/300=0.363, 146/400=0.365. La moyenne est environ 0.363. L'angle \(\phi'_{\text{r}}\) est donc \(\arctan(0.363)\).
Schéma (Avant les calculs)
Recherche de l'Enveloppe Résiduelle
Calcul(s) (l'application numérique)
Une régression linéaire sur les 4 points résiduels donne une ordonnée à l'origine très faible. En forçant la droite à passer par l'origine (hypothèse \(c'_{\text{r}}=0\)), on trouve la meilleure pente :
On en déduit l'angle de frottement résiduel :
Schéma (Après les calculs)
Enveloppe de Rupture Résiduelle
Réflexions (l'interprétation du résultat)
L'angle de frottement résiduel de 20° est significativement plus faible que l'angle de pic. Le fait que l'enveloppe passe par l'origine (\(c'_{\text{r}}=0\)) est cohérent avec la destruction complète de la structure initiale du sol. Ce jeu de paramètres représente l'état de résistance le plus bas possible pour ce sol.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne pas faire une régression linéaire standard sur les points résiduels si l'ordonnée à l'origine n'est pas physiquement justifiée. Une petite valeur positive de \(c'_{\text{r}}\) peut apparaître à cause des imprécisions de mesure, mais il est souvent plus correct et plus sûr de l'ignorer et de forcer la droite par l'origine.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- L'enveloppe résiduelle est déterminée à partir des points (\(\sigma'_{\text{n}}, \tau_{\text{r}}\)).
- On fait généralement l'hypothèse que la cohésion résiduelle \(c'_{\text{r}}\) est nulle.
- L'angle de frottement résiduel \(\phi'_{\text{r}}\) est souvent nettement inférieur à l'angle de pic \(\phi'_{\text{p}}\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Certaines argiles, dites "sensibles", ont une structure très fragile. Une fois remaniées (par exemple par un choc ou une vibration), elles peuvent perdre presque toute leur résistance et se comporter comme un liquide. Les glissements de terrain dans les argiles rapides de Scandinavie ou du Canada sont des exemples spectaculaires et dangereux de ce phénomène.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Avec les paramètres résiduels, quelle serait la résistance \(\tau_{\text{r}}\) attendue pour \(\sigma'_{\text{n}} = 250 \, \text{kPa}\) ?
Question 4 : Comparer et interpréter les résultats
Principe (le concept physique)
La comparaison des paramètres de pic (\(c'_{\text{p}}=40 \, \text{kPa}, \phi'_{\text{p}}=24.2^\circ\)) et résiduels (\(c'_{\text{r}}=0 \, \text{kPa}, \phi'_{\text{r}}=20^\circ\)) met en évidence la perte de résistance significative de l'argile après de grands déplacements. Cette perte est due à la destruction de la structure surconsolidée (perte de cohésion) et à l'alignement des particules (réduction du frottement). C'est un comportement "fragile" : le sol est relativement résistant au début, puis sa résistance chute brutalement.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
L'indice de fragilité (\(I_B\)) est un paramètre qui quantifie cette perte de résistance. Il est défini comme \(I_B = (\tau_{\text{p}} - \tau_{\text{r}}) / \tau_{\text{p}}\). Un indice de fragilité élevé indique un sol qui perd une grande partie de sa résistance après la rupture, ce qui peut mener à des ruptures progressives et rapides. Dans notre cas, à 400 kPa, \(I_B = (220-146)/220 \approx 34\%\), ce qui est significatif.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Choisir les bons paramètres est une des décisions les plus critiques pour un ingénieur géotechnicien. Utiliser les paramètres de pic pour analyser un glissement de terrain existant serait une grave erreur conduisant à une surestimation de la sécurité. À l'inverse, utiliser les paramètres résiduels pour le design d'une fondation neuve serait trop conservateur et très coûteux.
Normes (la référence réglementaire)
L'Eurocode 7 insiste sur le fait que le modèle géotechnique doit être choisi en fonction du mécanisme de rupture pertinent. Pour les problèmes de stabilité à long terme des pentes ou la réactivation de glissements, il est explicitement recommandé d'utiliser les paramètres de résistance résiduelle, car un plan de rupture s'est déjà formé et de grands déplacements ont eu lieu.
Formule(s) (l'outil mathématique)
La comparaison est qualitative et quantitative : on compare les valeurs de \(c'\) et \(\phi'\) et on discute des implications physiques et pratiques de la différence.
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que les deux jeux de paramètres déterminés sont représentatifs des états de pic et résiduel du sol sur le site.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Paramètres de Pic: \(c'_{\text{p}} = 40 \, \text{kPa}\), \(\phi'_{\text{p}} = 24.2^\circ\)
- Paramètres Résiduels: \(c'_{\text{r}} = 0 \, \text{kPa}\), \(\phi'_{\text{r}} = 20^\circ\)
Astuces(Pour aller plus vite)
Une règle simple est : "sol intact, jamais cisaillé ? On peut utiliser les paramètres de pic (avec un coefficient de sécurité). Sol déjà glissé ou grande déformation attendue ? Obligation d'utiliser les paramètres résiduels."
Schéma (Avant les calculs)
Comparaison des Enveloppes
Calcul(s) (l'application numérique)
L'interprétation principale est qualitative. Par exemple, pour une contrainte normale de 300 kPa, la perte de résistance est calculée comme suit :
Cela représente une chute de 38% de la résistance de pic à ce niveau de contrainte.
Schéma (Après les calculs)
Comparaison des Enveloppes (avec valeurs)
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La résistance résiduelle est le paramètre clé pour analyser la stabilité à long terme des pentes et des glissements de terrain qui ont déjà bougé. Une fois qu'un plan de cisaillement s'est formé dans le sol, c'est la résistance résiduelle qui gouverne toute réactivation future du mouvement, par exemple suite à une augmentation de la pression de l'eau. On l'utilise donc pour vérifier la stabilité des pentes existantes, pour dimensionner des ouvrages de confortement (clous, tirants) sur des glissements anciens, ou pour évaluer le risque de réactivation.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne jamais utiliser les paramètres de pic pour un problème impliquant de grandes déformations ou la réactivation d'une rupture existante. C'est une erreur classique qui peut avoir des conséquences catastrophiques. Il faut toujours se demander : "le sol est-il intact ou un plan de cisaillement préexiste-t-il ?"
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Les argiles surconsolidées ont un comportement fragile : une résistance de pic élevée suivie d'une chute vers une résistance résiduelle plus faible.
- La résistance de pic (\(c'_{\text{p}}, \phi'_{\text{p}}\)) est utilisée pour l'analyse de la rupture initiale d'un sol intact.
- La résistance résiduelle (\(c'_{\text{r}}, \phi'_{\text{r}}\)) est utilisée pour l'analyse de la stabilité de glissements préexistants.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Le phénomène de "rupture progressive" est directement lié à la fragilité du sol. Dans un grand talus, la rupture peut s'initier en un point (où le pic est atteint). La contrainte se reporte alors sur les zones voisines, qui rompent à leur tour. Le front de rupture se propage ainsi à travers le massif, et la résistance globale du talus tend vers la résistance résiduelle, bien avant que tout le volume de sol ait subi de grandes déformations.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Pour un projet de nouvelle fondation sur ce sol intact, quels paramètres utiliseriez-vous dans vos calculs ?
Outil Interactif : Enveloppes de Mohr-Coulomb
Ajustez les paramètres de résistance pour voir comment ils modifient les enveloppes de rupture par rapport aux points expérimentaux.
Paramètres de l'Enveloppe de Pic
Paramètres de l'Enveloppe Résiduelle
Le Saviez-Vous ?
La catastrophe du barrage de Vajont en Italie en 1963, qui a causé plus de 2000 morts, est un exemple tragique de l'importance de la résistance résiduelle. Un flanc de montagne entier a glissé dans le lac de barrage le long de plans de cisaillement préexistants dans une formation d'argile. L'analyse de stabilité, si elle avait été basée sur la résistance résiduelle (très faible) au lieu de la résistance de pic, aurait pu prédire la catastrophe.
Foire Aux Questions (FAQ)
Pourquoi la cohésion résiduelle \(c'_{\text{r}}\) est-elle considérée comme nulle ?
Dans les argiles surconsolidées, la cohésion de pic est principalement due à la structure "verrouillée" des particules, héritée des contraintes passées. Les grands déplacements cisaillent et détruisent cette structure. Les particules d'argile, qui sont des plaquettes, s'orientent parallèlement au plan de cisaillement. Dans cet état, il n'y a plus de cohésion structurelle, et la résistance n'est plus assurée que par la friction entre les feuillets, d'où c'r ≈ 0.
Tous les sols ont-ils une résistance de pic et résiduelle ?
Non. Ce comportement "fragile" (pic suivi d'une chute) est typique des sols denses ou surconsolidés (sables denses, argiles surconsolidées). Les sols lâches ou normalement consolidés (sables lâches, argiles normalement consolidées) ont un comportement "ductile" : leur résistance augmente avec la déformation jusqu'à atteindre un plateau (appelé état critique ou valeur ultime) sans pic prononcé. Pour ces sols, la résistance de pic et la résistance ultime sont quasiment confondues.
Quiz Final : Testez vos connaissances
1. Pour analyser la stabilité d'un talus dans lequel un ancien glissement s'est produit, vous devez utiliser...
2. L'angle de frottement de pic (\(\phi'_{\text{p}}\)) est supérieur à l'angle de frottement résiduel (\(\phi'_{\text{r}}\)) principalement à cause...
- Résistance au Cisaillement
- Contrainte de cisaillement maximale qu'un sol peut supporter avant de rompre. Elle est définie par la cohésion et l'angle de frottement.
- Contrainte Effective (\(\sigma'\))
- Contrainte supportée par le squelette solide du sol. C'est la contrainte totale moins la pression de l'eau interstitielle (\(\sigma' = \sigma - u\)). Elle gouverne la résistance du sol.
- Argile Surconsolidée
- Argile qui a été soumise, dans son histoire géologique, à une contrainte effective plus élevée que sa contrainte actuelle. Elle est généralement plus rigide et plus résistante qu'une argile normally consolidée.
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